Dans le monde de la chasse au chien courant, peu de phases sont aussi fascinantes et cruciales que le « rapprocher ». C’est un moment suspendu, où l’instinct et la science du pistage s’entremêlent. Pour les non-initiés, c’est une lente progression. Pour les passionnés, c’est une symphonie de signaux subtils, la promesse d’une belle menée.
Qu’est-ce que le Rapprocher ?
Le rapprocher est l’action, pour un chien courant, de remonter une « voie » (la piste odorante laissée par un animal) vieille de plusieurs heures. Contrairement à la menée où le chien poursuit un animal qu’il a en vue ou dont la piste est très fraîche, le rapprocher est un travail de recherche patient et méticuleux.
Le chien ne suit pas une odeur forte et continue, mais plutôt des fragments d’effluves laissés durant la nuit. Il doit faire preuve d’une concentration extrême pour ne pas perdre ce fil olfactif ténu. C’est un véritable travail de détective où le rapprocher du chien courant consiste à reconstituer le parcours de l’animal jusqu’à son lieu de repos diurne, sa « remise ».
A Savoir
Le nez du chien possède, grâce à sa structure interne, une surface extrêmement vaste sur laquelle des millions de cellules olfactives transmettent directement les impressions sensorielles au cerveau. Comparés aux humains, les chiens perçoivent les odeurs avec une sensibilité bien plus grande et distinguent également davantage de types d’odeurs. Ils peuvent accumuler une odeur dans leur nez sur plusieurs respirations, ce qui les rend encore plus sensibles.
Dans le cerveau, les odeurs sont d’abord traitées inconsciemment, puis consciemment. Le chien reconnaît alors de quoi il s’agit, où cela se trouve et quelle quantité d’odeur est présente. Il peut « sentir en stéréo », c’est-à-dire déterminer la direction d’où provient une odeur. Il est capable de percevoir l’espace par l’odorat.
Ainsi, il peut comparer, différencier et localiser les odeurs, même lorsqu’elles sont très faibles ou recouvertes par de nombreuses autres. Il peut même sentir le passé.
L’air circule toujours dans la même direction à travers la zone olfactive, ce qui est idéal pour la détection des odeurs. Avec une forte expiration, le chien libère à nouveau cette zone afin de pouvoir se concentrer sur d’autres odeurs.
L’une des caractéristiques de nos chiens courants suisses réside dans leurs longues oreilles papillotées, qui doivent dépasser d’au moins un centimètre la truffe. Leurs extrémités sont bien arrondies et, lorsque le chien colle son museau au sol, ces oreilles se déploient en formant un cône. Cette particularité l’aide à canaliser et à démêler les émanations odorantes, facilitant ainsi son travail de pisteur.
Le travail du chien courant au rapprocher
Observer un chien en plein rapprocher est un véritable spectacle, à la fois captivant et émouvant. Chaque geste, chaque attitude révèle l’intensité de son travail et la force de son instinct.
Le chien, concentré, travaille le nez collé au sol, aspirant chaque particule odorante laissée sur son passage. Sa respiration devient alors plus profonde, parfois même sonore, comme si chaque inspiration l’approchait un peu plus de sa cible. Chaque chien courant possède son propre timbre de voix, ce qui permet de l’identifier sans même le voir.
Dans le travail du rapprocher, l’expression vocale varie : certains chiens gardent une voix discrète, tandis que d’autres laissent échapper de petits gémissements, des pleurs, des jappements étouffés, ou parfois même des abois plus intenses. Ces signaux témoignent de la difficulté de la piste, tout en affirmant qu’ils sont sur la bonne voie.
L’attitude corporelle trahit également leur engagement total. La queue frétille par saccades, le corps se tend, chaque muscle se met au service du flair. Rien n’existe autour d’eux, si ce n’est cette odeur qu’ils suivent avec ardeur. Et si, parfois, la voie se perd, le chien courant ne se décourage pas. Il revient sur ses pas ou disons il fait ses arrières, explore les recoins oubliés, et fait preuve d’une ténacité remarquable pour retrouver le fil.
Ce travail, mélange d’instinct, de génétique et d’expérience, est l’apanage de nos races de chiens courants. Leur persévérance, leur intelligence et leur passion pour la chasse en font des compagnons incomparables et des artistes du rapprocher.
Peut-on apprendre et améliorer le rapprocher chez un chien courant ?
Bien que le talent pour le rapprocher soit en partie inné, cette compétence se travaille et se perfectionne avec patience et méthode. Le succès repose sur une amélioration progressive, adaptée au chien et à son niveau.
Il est essentiel de commencer tôt. Dès son plus jeune âge, vous pouvez habituer votre chiot à suivre des pistes simples et courtes, avec des tracés artificiels de peau de gibier ou semelles traceuses. Ces premières expériences posent les bases de la concentration et du flair, et permettent au jeune chien de comprendre le concept de piste à suivre.
La difficulté doit ensuite être augmentée progressivement. Allongez les distances, espacez le temps entre le tracé de la piste et le début du travail, et variez les terrains : prairie, sous-bois, chemins… Cette diversité apprend au chien à s’adapter aux conditions et aux subtilités de chaque voie.
Travailler la créance est également fondamental. Le chien doit être conditionné à rechercher l’animal que vous souhaitez chasser, sans se laisser distraire par des voies plus fraîches laissées par d’autres espèces. C’est un apprentissage de patience et de concentration, qui demande constance et répétition.
Enfin, rien ne remplace l’expérience sur le terrain. Multiplier les sorties permet au chien de se confronter à des situations réelles, d’acquérir de l’assurance et de perfectionner ses réflexes. Chaque sortie est une leçon, non seulement pour le chien, mais aussi pour le maître, qui apprend à interpréter les signaux et à guider subtilement son compagnon.
Notre Bruno Saint-Hubert Français : un flair hors du commun
Au sein de notre club, le Bruno Saint-Hubert français d’aujourd’hui, héritier du chien courant suisse d’Argovie — une souche totalement disparue dans son pays d’origine mais recréée avec succès en France.
Les deux principaux acteurs de ce projet ont été Pascal Fol et Patrick Guénolé.
Pascal s’est attaché à la reconstitution du cheptel, consacrant son énergie à redonner vie à cette race.
Patrick a ensuite donné forme à ce travail en structurant et en décrivant l’ensemble des éléments recueillis.
Le comité a examiné cette proposition, l’a amendée puis validée.
Ainsi, le standard, présenté pour la première fois en 2000, a été officiellement enregistré en 2003.
Le Bruno Saint Hubert Francais, figure désormais parmi les meilleurs rapprocheurs. Il se distingue par une sûreté exceptionnelle sur la voie froide et une ténacité absolue.

Chien courant d’Argovie

Le Bruno Saint Hubert Français
Avec une ossature plus robuste que celle du chien courant suisse, il présente une allure plus ample et une foulée plus allongée. Les dimensions corporelles correspondent à celles du Chien courant suisse : la hauteur au garrot se situe entre 47 et 57 cm pour les femelles et entre 49 et 59 cm pour les mâles, respectant ainsi le rapport harmonieux entre ossature et musculature caractéristique de la race.
C’est un chien plutôt massif, mais sans lourdeur, doté d’une ossature solide qui lui confère une impressionnante puissance. Son regard, marqué par des yeux dont les paupières inférieures sont légèrement tombantes, dégage une expression mélancolique, parfois même un peu triste.
Il est très attaché à son maître et manifeste une grande proximité et fidélité envers lui.
Sa voix est gorgée, typique d’un chien courant de premier ordre, mais il reste désormais un hurleur confirmé, capable de suivre méthodiquement la voie sur de longues distances et sur des effluves ténus.
En conclusion
Le rapprocher est bien plus qu’une simple étape de la chasse. Il incarne l’essence même du travail du chien courant, révélant son intelligence, sa persévérance et la richesse de son héritage génétique. Pour nous, propriétaires et passionnés, apprendre à maîtriser cet art avec notre chien de chasse, c’est renforcer notre complicité et partager des moments d’une intensité rare.
Alors, la prochaine fois que vous serez sur le terrain, prenez le temps d’observer ce travail minutieux. Vous y verrez non seulement un chien qui piste, mais aussi l’expression vivante d’un art ancestral, perpétué grâce à notre passion commune.
Le rapprocher du Bruno Saint Hubert Français
Questions à choix multiples : Tester ses connaissances sur les chiens courants suisses
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